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Le deuil du printemps

by Re-Drum | Stereographics

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1.
Chaque ombre, aussi profonde soit-elle, est menacée par la lueur de l’aube. Pourtant, la lumière du plus brillant des astres n’éclaire qu’une infime partie de l’immense masse ténébreuse qui nous garde et nous couve. Force est de constater qu’il n’y a d’universel que ce qui, à plus haute raison, n’est pas. J’aurais voulu pouvoir continuer à croire en un absolu charnel, lumineux, romantique, jusqu’à la fin des temps. J’aurais aimé que ma peau est la tienne soit autre qu’un voile fin, flottant dans un océan nocturne et vide. J’aurais aimé que tout est une texture. Le temps, par compassion, m’a donné tort. La vie m’apparaît désormais comme un bref mensonge, ponctuant deux morts. Ainsi, il me faut faire le deuil du printemps. Celui de mes dix-neuf ans. Ceux qui m’ont porté jusqu’à ici et, aussi, ceux qu’il me reste à vivre. Depuis quelques temps, mes jours consistent à préparer mon trépas. Je me prépare à mourir à ce que j’ai été pendant toutes ces années. Un humain qui n’a eu d’autre idéal, d’autre projet, que celui d’aimer et d’être aimé par un autre humain, un seul, pour l’éternité ; le premier et le dernier, à la fois. Ce même humain qui marche depuis des millénaires, ici bas. Celui qui t’écrivais des poèmes en espérant que tu vois en lui ce qu’il voyait en toi ; un absolu, une fin, une raison d’être... un au-delà. Aussi, en faisant le deuil du printemps, je fais le deuil des autres saisons. En faisant le deuil de celui que j’étais, c’est ton deuil que je fais. En faisant le deuil de l’amour, je fais le deuil de ce monde car, oui, ce monde n’est qu’amour. Tu n’as pas tort de le croire. Tu as même raison d’y faire ta maison. Ce monde n’est ni artificiel, ni vain,ni superflu. Ce n’est pas là, ma pensée. Ce monde est un printemps, doux, réconfortant, tendre et tiède. Il est comme un refuge où il fait bon de vivre, autant que de passer ; où les bains sont emplis de parfums familiers ; où l’on met ses vêtements préférés et l’on profite de la neige sur le pallier, autant que des tournesols. Il fait bon y vivre, autant qu’y passer. Tu auras été tel une hôte, à mes yeux. Ce monde, j’y suis un simple voyageur. Toi, non. Il t’appartient. Si tu en doutes, un instant, dis-toi que je te l’offre. J’ai été roi, tu sais ? Tu ne le crois pas ? J’ai épousé une reine, pourtant. Mais bon... je l’ai quittée pour mon rêve d’enfant. Et pour toi. Pardonne-moi de t’avoir insulté. J’étais jeune. Idiot. Je ne comprenais pas l’étendu de mon ignorance. Mes yeux et mon coeur était fixé sur la même petite étoile bleue et j’ai oublié de voir sa mère, son berceau, la nuit, infinie et froide. Les ténèbres qui nous gardent. En vérité, comme je te l’ai montré, je n’étais pas poète. Je n’étais pas non plus un amant. Je n’étais même pas un homme. Ce que je suis, réellement, je préfère le garder pour moi. Ce que je trouve touchant est que, après avoir porté tous ces masques, les rôles se sont échangés. Certes, certaines choses restent les mêmes. Pourtant, le froid n’est plus si froid. Le chaud disparaît. Que restera-t-il, après ce printemps ? Cela n’a pas grande importance et les mots n’ont pas d’emprise sur une nuit qui ne connaît aucune lumière, aucune aube et où ta petite étoile bleue, accrochée à l’oreille de la monture du sagittaire, comme une boucle, ne brille plus. Merci pour cette lueur et cette longue saison. Cette étape a eu du sens dans mon voyage. Pourtant, il me faut retourner dans mon royaume, celui qui n’en est pas un. Il me faut boire cette eau qui n’est pas de l’eau, car j’en ai besoin. Il me manque cette joie qui n’est pas une joie, cette lumière qui ne brille pas et ce printemps, qui ne contient aucun été. En un sens, rien n’aura changé. Si tu me cherches, tu me trouveras. Non pas dans ton coeur où tes souvenirs. Ni dans le feu des bougies ou bien le rouge, le noir. Pas non plus dans les livres. Tu me trouveras le moment venu ; dans cet instant qui n’en est plus un ; dans un souffle qui ni inspiration, ni expiration. Voilà la clef de ce séjour. Sache qu’il est protégé par un gardien, que j’ai placé là. Celui-ci est un grand menteur. Il est l'origine et la fin de toutes les croyances. Il est la croyance, la foi, en quelque idéal que ce soit. Oui, y compris l’amour. Le nom de ce gardien est Guerre. Aussi, comme dit le poète, tu n’as jamais eu le choix entre la paix et la guerre. Tu as le choix entre une guerre et une autre guerre. Ce monde est un champ de bataille où tout combat est vain. Ce monde est un champ de bataille où tout combat est vain. Un jour, alors qu’un orage d’éclairs rouges et de nuages noirs et tourbillonnants recouvrira le monde, Guerre, la peau du soleil, se présentera devant l’humanité. Notre combat sera féroce et l’humanité y perdra son avenir, alors que Guerre ne sera, en rien, diminué. Ainsi, alors que l’Homme perdras tout désir et espoir, viendras le temps de s’assoir et de faire le deuil du printemps. Viendra le temps de brûler, jusqu’aux cendres, chacun de nos rêves. En effet, comme nous serons amputé de notre futur et que, de notre passé, il ne restera que quelques blessures, comme l’âme humaine comprendra que ce qui est perdu le sera, à jamais, elle refusera de vivre l’immortalité qui est la sienne. D’après la légende, les cendres du monde recouvriront nos visages et Guerre, l’être solaire, qui fut jadis notre ennemi, sera désormais notre allié. Il dévorera le monde de ses flammes infinis, chaque jour un peu plus. Et la bienheureuse lune s’éloignera du monde, chaque jour un peu plus. Nous serons heureux. Nous exulterons de notre état premier, non pas par sadisme mais simplement d’une passion vidée de certitudes. Nous serons libres des chaînes de nos croyances, du poids de nos rêves et de nos souvenirs qui, sans cesse, se répètent. Aussi, le printemps qu’est ce monde n’aura été ni un souvenir, ni une promesse, ni une réalité. Il n’aura, à vrai dire, pas été.
2.
Ce monde est un champ de bataille Oui, ce monde est un champ de bataille, quelque soit les armes que l’on y choisit. Certains optent pour leurs mains, d’autres pour le fer. L’or, les roses, les mots, les coeurs, les idées, ou autres, sont autant de manières de se battre, ici-bas. Ce monde est un champ de bataille et tout y est guerre. La valse des amants, autant que le feu des bombes. Et, il est vrai que, toute guerre, sacrée ou non, est vaine ; qu’elle répande le sang ou le sperme, qu’elle apporte la vie ou l’enlève. Il nous faut bien nous rendre compte de la violence contenue dans la plus douce tendresse. Au final, ces choses sont égales. Ce monde est un champ de bataille et il nous faut bien choisir notre armée. Certains choisissent d’aimer. D’autres de tuer. Je suis plus solitaire. Aussi, je choisis de n’aimer que ce que je suis et de ne tuer que ce que je suis. Alors que ce que je suis disparaît, peu à peu, ce monde m'apparaît comme intérieur. Suis-je autre que cela ?
3.
Il me faut aimer et tuer ce que je suis. De ma main gauche, je bats le tambour qui rythme mon coeur et, de la droite, j’allume le brasier qui me consume. Dansant dans les flammes, j’en viens à accepter mon propre égarement, mes certitudes et le mouvement absurde de mon esprit. Je n’existe, à vrai dire, qu’en tant que croyance propre. Ma connaissance est ma prison et mes croyances, les chaînes.
4.
La connaissance est une prison où la lumière de mon esprit se reflète. La vérité de cette lumière est son reflet. Mais son reflet, n’est pas. Aussi, ce qui est, est un autre. La vérité de cet autre est un désir d’au-delà. Dans chacune de mes notions, j’ai appris à voir le reflets de ce que je suis devenu. Pourtant, je me sais distinct de tous ces reflets. J’avance dans une chambre de miroirs et, comment pourrais-je me confondre, un seul instant, avec toutes ces images ? Je sais n’en être aucune. Aussi, il me faut les rejeter, toutes. Tout n’est que désir. Je ne suis que désir. Ma peau a été façonné par la rencontre de deux passions et mon esprit est le reflet clair de mes penchants. Suis-je autre que cela ? La vérité de la lumière est son reflet et la vérité du reflet n’est pas.
5.
La fleur d’orchidée, comme l’idée qui lui est associée, est vouée à la mort. Aussi, de vrai il ne peut y avoir que l’au-delà de la fleur. La fleur, son nom, son image, sont des mensonges agréables, des illusions maternelles. Ces illusions tournent en cercle autour de l’essence de la fleur, qui est son expérience propre. Cette expérience émane de la vérité de le fleur, son au-delà, l’ombre de son ombre, qui n’est pas. Notre univers se dissout, toujours un peu plus. Les souvenirs d’antan reviennent à la vie une fois de plus alors je chercherai refuge, non pas dans les idées ou les prétendues vérités, mais dans le royaume infini de mon ignorance. Alors que j’ignore jusqu’à ce que je suis, les frontières qui me séparent du monde s’effondre. Le monde cesse d’être et je cesse d’être, ici. Il ne reste qu’un grand vide. Ce vide, même, m'apparaît être un mensonge. La fleur d’orchidée est vouée à la mort, l’eau qui la nourrit ne fait que passer puis s’évapore. L’air qu’elle respire est la frontière qui la sépare de son au-delà. Au-delà de cet air, plus rien ne subsiste. Au-delà des croyances il n’y a ni vérité, ni mensonge. Ni vie, ni mort. Il ne reste que le silence, le calme. Tout mouvement a cessé. Je suis, désormais, seul.
6.
Seul 04:15
Au commencement, j’étais seul. Alors, vinrent les rêves et, des rêves, naquit le monde. Comme le monde était, je le désirai. Comme je désirai, je devins. Comme je devins, ma solitude m’apparut lointaine. Je devins ton amant. Je devins le feu et tu tremblais dans mes bras. Tu devins mon eau j’eu besoin de toi. Comme nous devenions, les choses changèrent et le monde s’étendit. Notre univers, notre lieu commun, entra en expansion. Donc, le temps. L’espace. Je pris conscience de ce que je n’étais plus et, comme le monde ne suffisait pas, je voulu être seul, à nouveau. Je sacrifia donc tout qui m’était extérieur au feu de ma nature véritable, à commencer par ce que j’étais devenu. Là où brûlait un grand brasier ne restait, désormais, que cendres. Et ma peau fut couverte de ces cendres sacrées. Et mon sang était ces cendres. Après avoir dissous mon identité, je dissous, calmement, mes passions. Puis, vint mon corps. Enfin, vint le monde. Face à mes rêves d’enfants, je n’eu d’autres choix que de dissoudre l’au-delà des rêves, ce fil lumineux fait de connaissances. Alors, le vide fut. Je consomma ce vide et derrière ce voile changeant, m’apparut ce qui n’est pas. Ce qui n’est pas est tout ce que je suis. A la fin, j’étais seul.
7.
Mon deuil s’achève et le printemps que j’étais, celui que nous étions, arrive à son terme. Le monde n’est que cendre et nous nous sommes battus, une fois de plus ; nous avons gagné une autre guerre. Pour pouvoir nous aimer il nous a fallu tuer tout ce que nous étions. De la croyance nous avons avancé vers l’étreinte et de l’étreinte, à l’union. Notre ignorance suprême, notre lieu commun, nous a permis de devenir un. Ce printemps, nous l’avons rassemblé dans la paume de nos mains, crée de toute pièce, un jour. Les fleurs y sont devenues épées. L’amour est devenu une guerre sans fin. Le monde est devenu cendres. Ce printemps a brûlé. Nous avons consumé nos rêves de la même manière qu’ils nous ont consumés. C’est à croire que nous n’étions que rêves. Changeants, fluides, transparents. Nous nous rêvions mutuellement. Au-delà de ces rêves, n’existent que les cendres d’une innocence passée. Une expérience complète. Non. Nous ne sommes pas un. Nous n’avons, simplement, jamais été.
8.
Xiabalba 04:01

about

Album réalisé, à quatre mains, à distance, dans la solitude du premier confinement en France et les peurs qu'il a pu générer. L'album ne sera, finalement, jamais réellement achevé. Le texte de l'album fut écrit en une nuit, dans l'urgence du moment. La musique a été retravaillée longuement après coup. Les enregistrements vocaux originaux, proviennent tous de cette période et n'ont pas été ré-enregistrés, à dessein.

"Tu n'as jamais eu le choix entre la paix et la guerre. Tu as le choix entre une guerre et une autre guerre"

"Il faut porter en soi un chaos pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante" - Nietzsche

credits

released June 21, 2020

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Msc+Vcl+Artwrk = L.U

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